Éloge de la candeur, réprobation de la laideur

Depuis quelques jours, au sein même des partisans de la République catalane, des voix s'élèvent contre l'«impréparation» de la déclaration d'indépendance. Le lent décompte des «sí» par Carme Forcadell aurait été alors le prélude d'un grand vide. 

De même, on critique un peu facilement qu'il n'y eût pas de constitution (pré)écrite. Elle doit être le fruit d'un travail conjoint de la société et d'une assemblée constituante élue ultérieurement. On a daubé la loi de transition. Contrairement à la Constitution espagnole que d'aucuns prétendent gravée dans le marbre alors qu'elle fut conçue dans le giron d'une dictature finissante (?), le projet constitutif catalan s'inspire de l'article 28 de la Constitution française de l'an I (1793) qui dispose que les constitutions ne sont pas immuables et qu'une génération ne doit pas obérer ou entraver les générations futures.

Alors, candeur ? Peut-être, mais nul cynisme. Bien au contraire d'une attitude espagnoliste qui vire à l'hystérie. Des plaisanteries douteuses circulent sur le surpoids du vice-président Junqueras et son œil défaillant. Une diapositive fait florès qui parle d'une nouvelle voiture fabriquée à Barcelone, la SEAT 155, avec un phare cassé. Quelle laideur. Or la laideur est le signe et le moteur de la psychologie de masse. Il n'est que de songer à l'exposition «Le Juif et la France» organisée sous l'Occupation par le Gouvernement de Vichy devançant les souhaits nazis. Dix Catalans, élus ou représentants de la société civile, sont emprisonnés avec des détenus de droit commun pour une durée sciemment indéterminée. D'autres suivront. Je pense à eux. Ce sont mes frères, le sang qui coule dans leurs veines est le mien. Oriol Junqueras croit en Dieu, je n'y crois pas, mais je crois à son combat pour l'Humanité.