Les masques tombent

Dans Juan de Mairena, Antonio Machado, dont il est souvent question ici, écrit : «lo esencial carnavalesco no es ponerse careta, sino quitarse la cara» (l'essentiel carnavalesque ne consiste pas à mettre un masque mais à ôter son visage).

C'est un mouvement inverse qui se produit ces temps-ci, les masques tombent et les visages de l'Espagne éternelle exhibent leur morgue.

Madrid n'avait jamais accepté qu'il y eût en Catalogne un ministère («conselleria», en catalan) des relations extérieures, celles-ci étant l'apanage du seul gouvernement central. On ne sera donc pas étonné qu'il soit le premier à changer de titulaire, en vertu de l'article 155 de la Constitution espagnole. Le nouveau locataire est un ancien ambassadeur d'Espagne au Paraguay. Sa première décision : que tous les rapports soient rédigés en espagnol et qu'on bannisse le catalan des échanges.

Il s'agit donc bien d'une entreprise concertée qui vise à éradiquer la catalanité par delà le catalanisme, le visage tourné vers le soleil, «cara al sol» comme le proclamait l'hymne phalangiste. C'est oublier un peu vite que l'un de ses versets annonçait «volverá a reír la primavera» (le printemps recommencera à rire).

Parions que l'entreprise échouera et que le prochain printemps sera catalan et en catalan.