«Ne nous parlez pas de justice, tant que vous exercerez vengeance et chantage»

Dans son éditorial du quotidien digital Vilaweb, Vicent Partal écrit :

«La comparution hier de la présidente du Parlement de Catalogne, Carme Forcadell, ainsi que des autres membres souverains du bureau a été fidèle au modus operandi des comparutions de Jordi Sànchez et Jordi Cuixart puis, par la suite, du vice-président Oriol Junqueras et de sept membres du gouvernement: la vengeance, et non pas la justice, en était la grande protagoniste.

La différence n'est pas un vain mot. Dans un pays démocratique, la justice examine les faits et non les intentions ; elle statue selon les faits et non selon les intentions, toujours extrêmement difficiles à prouver, sans aucun doute. Il est clair que dans un pays démocratique, la justice est indépendante et n'agit pas selon les ordres du pouvoir exécutif. Et dans un pays démocratique, un gouvernement n'a jamais l'intention d'utiliser la prison comme un outil contre un adversaire politique. Plus encore, dans un pays démocratique, un gouvernement ne s'approprierait pas un article de la constitution, en l'étirant comme un chewing-gum jusqu'à ce qu'il soit méconnaissable et l'utilise pour changer la volonté des électeurs.

La présidente Forcadell a dû passer la nuit en prison. Car son cauchemar durera une nuit et nous espérons que ce cauchemar se terminera bientôt pour tous ceux qui sont en prison ou en exil, pour toutes les personnes menacées. Mais, malgré tout, nous pourrons difficilement oublier la partialité scandaleuse avec laquelle s'est comportée la soi-disante justice espagnole.

La partialité est scandaleuse même dans les moindres détails. Un exemple d'hier, quand on se réfère au passé de Carme Forcadell en tant que présidente de l'ANC pour connoter son rôle de présidente du parlement [...] Hier, nous avons appris également que la Cour espagnole serait prête à autoriser la libération des membres du gouvernement emprisonnés à condition qu'ils jurent fidélité à la constitution espagnole actuelle. Une proposition encore pire, si c'est encore possible, que ce qu'ils font à la présidente Forcadell. Parce que s'il y a délit, il y en a et s'il n'y en a pas, il n'y en a pas. Mais conduire une personne en prison et lui dire que si elle s'humilie publiquement, elle sera libérée, c'est tout simplement lui proposer un chantage.

Tout cela est scandaleux, mais il y a une indéniable faiblesse : agir de la sorte ne vous garantit rien. Bien au contraire. Si l'Espagne veut que la Catalogne fasse partie de son État, il n'est pas bon de montrer clairement aux citoyens catalans que l'Espagne est un endroit où on ne peut pas vivre sans risque, où il est dangereux de rester si on n'obéit pas et, où la démocratie n'est qu'un vain mot et où la justice a simplement cessé d'exister, tuée par la vengeance et le chantage politique.»