Un autre aiMe contre la haine
Elle était née en France, à Avignon, un mois et deux jours avant l'armistice de 1945. Revenue sur sa terre d'origine, elle fit de la langue de son pays d'accueil, un outil précieux de communication entre les peuples et les jeunesses.
Professeure exigeante, rayonnante et estimée, elle sut faire, à l'Université Autonome de Barcelone, des échanges Erasmus le plus sûr moyen de rendre réelle une Europe de papier. Je sais un ami qui, sans elle, ne parlerait pas français ni n'aurait enraciné un amour que ses cours avait couvé.
Présidente d'Òmnium cultural depuis cinq ans, aux côtés de Carme Forcadell, alors présidente de l'ANC, elle avait conduit, avec constance et sans nulle tergiversation, la Catalogne à se déterminer.
C'était une personne simple qui circulait à Barcelone en bicyclette, sans nul besoin d'une escorte de protecteurs ou d'admirateurs.
Il y a deux ans, le jour de la Saint-Valentin, elle est décédée des suites d'un accident de la circulation. Centaure gracile, elle n'avait rien pu contre la déraison automobile.
Elle s'appelait Muriel Casals i Couturier.
Avant-hier midi, devant la porte du parlement de Catalogne, un drapeau étoilé et deux bougies lui rendaient un hommage discret. Ce ne fut pas du goût de Carlos Carrizosa, député de Ciudadanos, qui tenta d'obtenir des agents en faction le retrait de l'estelada. José María Espejo-Saavedra, du même parti et membre du bureau de l'assemblée, lui emboîta le pas dans le même dessein, sans plus de succès.
Bien sûr, quelque temps plus tard, un obscur fonctionnaire déplaça la bannière étoilée et les deux bougies. Mais les larmes de cire devant la porte sont restées, comme pour signaler, discrètement, intensément, que, comme Muriel le fit, le peuple de Catalogne a encore foi en ses représentants.